FaustIn and Out

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Jean-Louis Fernandez

Ivan Márquez, élève metteur en scène du Groupe 47, fait choisir le public entre deux expériences théâtrales jouées simultanément. D’un côté Faust de Goethe et son pacte pour le savoir absolu ; de l’autre la réponse glaciale d’Elfriede Jelinek qui dissèque cet absolu, prétexte à la domination masculine dans FaustIn and Out.
"Jelinek qualifie certaines de ses pièces de parasites dans le sens où elle nourrit son texte avec les mots des grands auteurs. Dans Faust.ine and out, les victimes s’expriment parfois avec les mots de Goethe, de Heidegger ou de spots publicitaires, révélant la domination masculine intériorisée. Et comme un bruit parasite, cette pièce vient perturber la représentation du classique. J’ai donc imaginé un dispositif où l’expérience théâtrale participe de cette démarche. Une poignée de spectateur.rice·s est isolée du reste de l’assemblée dans un espace exigu ressemblant à une cave, accompagné·e·s de quelques acteur·rice·s. Cette petite cave, imbriquée avec la scène principale où se joue Faust de Goethe, prendra de plus en plus de place, jusqu’à ce que les deux espaces se rejoignent en un seul, faisant s’affronter les deux œuvres." Ivan Márquez
Avertissement : cette expérience immersive peut heurter des sensibilités (enfermement, propos portant sur des violences sexuelles).

Dans le même temps, Mathilde Waeber, élève metteure en scène, présente Sallinger de B.-M. Koltès avec une autre partie du Groupe.

Les deux élèves metteur·e·s en scène du Groupe 47 de l’École du TNS, Ivan Marquez et Mathilde Waeber, présentent leur projet personnel de 2e année avec les élèves de leur Groupe.

Spectacle d'Ivan Márquez, élève metteur en scène du Groupe 47
Avec une partie des élèves du Groupe 47 (2e année) de l'École du TNS en sections Jeu, Mise en scène/Dramaturgie, Scénographie-Costumes, Régie-Création

De Elfriede Jelinek
Mise en scène, adaptation et création vidéo Ivan Márquez
Traduction Magali Jourdan et Mathilde Sobottke
Dramaturgie et adaptation Alexandre Ben Mrad

Avec
Vincent Pacaud
Hameza Elomari
Charlotte Issaly
Naïsha Randianasolo
Thomas Stachorsky

Scénographie Jeanne Daniel-Nguyen
Lumière Charlotte Moussié
Costumes Valentine Lê
Création sonore Loïc Waridel
Régie générale Arthur Mandô
Conseil en littérature germanique Gregory Aschenbroich
Administration et diffusion Anaïs Calves, stagiaire, élève de l'IEP de Strasbourg

Suivi pédagogique à la mise en scène Claire ingrid Cottanceau

Les décors et les costumes ont été réalisés par les élèves scénographes et régisseur·re·s avec l’aide de l’équipe des ateliers du TNS et de l’équipe pédagogique de l’École.
Tous les services du théâtre ont travaillé aux côtés des élèves (équipes École, techniques, communication, relations avec les publics, accueil, presse...).
Dans le même temps Mathilde Waeber, également élève metteure en scène, présente Sallinger de Bernard-Marie Koltès avec une autre partie du Groupe 47.

Elfriede Jelinek est représentée par L’Arche – agence théâtrale. www.arche-editeur.com

 

Il y a dans l’écriture d’Elfriede Jelinek une radicalité qui dénonce le théâtre tout en le mettant au centre de son projet. Que ce soit dans Les Suppliants, ou dans Ce qui arriva après que Nora eut quitté son mari, les textes fondateurs sont rognés à l’os formellement et thématiquement, retravaillés à coups de massue, malmenés, et pourtant leur place fondatrice ne leur est pas ôtée. Ce rapport politique à la tradition théâtrale trouve pour moi une réalisation concrète dans les deux textes qu’Elfriede Jelinek nomme drames secondaires. Elle laisse le drame principal aux vieux hommes allemands (Lessing et son Nathan le sage, ou Gœthe et son Faust), et elle propose un drame qu’elle qualifie, non sans ironie, de “secondaire” puisque ingrat, au second plan, à l’image du travail des femmes.

Il me semblait important de faire entendre ce que la prix Nobel de littérature avait à dire à partir - ou autour - de la pièce dramatique la plus jouée du répertoire germanique. Il me semblait important, surtout, de faire ressurgir, par le théâtre, ce que le théâtre avait muséifié, à savoir la souffrance concrète, physique et non pas métaphorique des femmes. Les cas Fritzl et Kampush (l’une a été enfermée et violée par son père pendant 24 ans dans un abris anti-atomique, l’autre a été kidnappée pendant 8 ans dans une cave), sont des paroxysmes de la domination des hommes sur les femmes, mais il y a aussi une domination quotidienne et plus sourde que Jelinek n’oublie pas. Tout cela passe par un flot de paroles traversé de plusieurs discours et de plusieurs langues. Ce fil de pensées, comme une sonde qui traverse différentes couches de notre société, est au centre de la proposition. La langue de Jelinek, riche en jeu de mots, isolexismes et citations cachées, et magnifiquement rendue en français pour ce spectacle par Magali Jourdan et Mathilde Sobottke, sera au plus proche des oreilles des spectateurs dotés de casques devant des acteur.ices équipés de micros. La parole, arme à double tranchant et composée de nombreuses contradictions, sera à la fois affûtée et légère.

Jelinek qualifie certaines de ses pièces de parasites dans le sens où elle nourrit son texte avec les mots des grands auteurs. Dans Faust.ine and out, les victimes s’expriment parfois avec les mots de Gœthe, de Heidegger ou de spots publicitaires, révélant la domination masculine intériorisée. Et comme un bruit parasite, cette pièce vient perturber la représentation du classique. J’ai donc imaginé un dispositif où l’expérience théâtrale participe de cette démarche. Une poignée de spectateur·ice·s est isolée du reste de l’assemblée dans un espace exigu ressemblant à une cave, accompagné.es de quelques acteur·ice·s. Cette petite cave, imbriquée avec la scène principale où se joue Faust de Gœthe, prendra de plus en plus de place, jusqu’à ce que les deux espaces se rejoignent en un seul, faisant s’affronter les deux œuvres.

- Ivan Marquez -